Wednesday, March 27, 2013

JEAN-PIERRE VERNANT "La mythologie, c'est une vision de soi face au monde" Par François Busnel et (L'Express), publié le 26/06/2003 http://www.lexpress.fr/accessed 19.03.2013 14:22

Il a révolutionné l'étude de la civilisation grecque. Depuis son premier livre, Les Origines de la pensée grecque (1962), Jean-Pierre Vernant a proposé les analyses les plus novatrices des mythes grecs, dans la lignée de Dumézil et de Lévi-Strauss. Ardent défenseur de l'enseignement du grec, grand érudit, il est aussi un merveilleux passeur: son dernier ouvrage, L'Univers, les dieux, les hommes (Points/Seuil), est traduit en 32 langues. En prélude à notre série de grands reportages d'été, qui, dès la semaine prochaine, nous entraînera sur les traces d'Ulysse, il nous donne les clefs de L'Iliade et de L'Odyssée.

''La mythologie, c'est une vision de soi face au monde'' 
Que vous inspire l'idée trop répandue selon laquelle la mythologie grecque, et par conséquent l'enseignement du grec et du latin, ne sert à rien ?

Hélas! ce n'est pas une idée nouvelle. Quand il était ministre de l'Education nationale, Lionel Jospin m'a commandé, par l'intermédiaire de Claude Allègre, un rapport sur l'enseignement du latin et du grec dans le secondaire. A cette époque, du ministère aux directeurs d'établissement, tout le monde pensait qu'il fallait éliminer l'enseignement du grec car "ça ne servait pas à grand- chose". J'ai alors demandé aux professeurs de grec de m'envoyer une fiche sur laquelle seraient évoquées l'évolution de leurs effectifs dans les cinq dernières années, ainsi que la profession des parents des élèves qui choisissaient le grec. Double surprise: non seulement les effectifs étaient restés à peu près constants d'une année sur l'autre, mais j'ai constaté que les meilleurs élèves en grec étaient... ceux d'origine maghrébine, et notamment les filles! Dans mon rapport, j'ai donc battu en brèche l'idée de l'inutilité du grec en me fondant sur l'argument suivant: les Maghrébines ont parfaitement compris que la meilleure issue pour elles est de s'intégrer et que l'intégration implique de choisir ce qu'il y a de plus élitiste dans la culture à intégrer, c'est-à-dire ce qui semble le plus éloigné de ce que les gens se représentent comme étant la culture maghrébine.

"Etudier le grec sert à fabriquer le cerveau"

Cela dit, la culture grecque est commune à l'Europe du Nord et au Maghreb...

Absolument. Et on n'a pas besoin de remonter à saint Augustin pour le prouver! Le Maghreb a été fortement hellénisé et il a fait partie d'un ensemble culturel méditerranéen marqué par la culture gréco- latine. En étudiant le grec, les Maghrébines renouent donc d'une certaine façon avec leur propre passé. Voilà un exemple qui montre que l'on ne peut régler le problème du latin et du grec en prétendant qu'il s'agit là d'une culture élitiste et déconnectée de nos préoccupations actuelles. Mais il faut être clair, quand on me demande à quoi sert le grec, je réponds: "A rien." Pas plus que les mathématiques contemporaines ou la physique quantique. Ça ne sert à rien, sauf à fabriquer le cerveau, à composer ce qui s'appelle la culture. Le contact avec la littérature grecque, notamment L'Iliade et L'Odyssée, mais aussi les poètes tragiques, tels Eschyle, Euripide ou Sophocle, ou encore Sappho, n'est pas de l'ordre de l'utilité, mais de l'émotion et de la beauté. D'où viennent les mythes grecs? Ce que nous appelons "mythologie grecque", c'est sans doute ce qui était raconté autrefois aux petits enfants. Elle nous est connue par les textes des grands poètes classiques: Hésiode, Homère, Pindare et quelques autres. Leur particularité est la suivante: ce sont des récits "merveilleux", où il se passe toujours des choses extraordinaires, qui posent un problème concret, mais qui ne prennent jamais la forme d'un exposé théorique. La mythologie se distingue donc des traités philosophiques ou des livres d'histoire, tels qu'Hérodote ou Thucydide les concevront plus tard. Ce sont des contes. A travers ces histoires, qui sont toujours plaisantes à entendre, où il y a toujours un commencement et une fin, le problème posé se dévoile à mesure que le texte se déroule. Ainsi, lorsqu'Hésiode raconte la formation du monde ou la naissance de la première femme, il ne pose pas la question "Qu'est-ce que l'homme?" (que poseront en ces termes les philosophes), mais développe une histoire dont il faut se pénétrer pour saisir la progression dramatique. Derrière l'histoire émerge toujours une certaine façon de saisir le monde, de comprendre ce qu'est l'existence humaine, la place de l'homme dans le monde, le rapport de l'homme à la nature ou aux dieux...

"La mythologie propose une façon de se voir soi-même dans le monde"

Mais quelle est la fonction de cette histoire?

L'approche du mythe est très différente de celle à laquelle notre civilisation nous a habitués: elle marque une prise de distance par rapport à ce qui, aujourd'hui, nous semble évident. Comment penser la mort, par exemple? Pour nous, la mort est l'impensable, d'autant plus impensable que notre culture a forgé l'idée que chaque être est singulier et irremplaçable. Il y a un âge, vers 7 ou 8 ans, où les enfants se posent cette question. La mythologie sert à présenter ce problème et à lui apporter une réponse possible, mais sous la forme d'une belle histoire, beaucoup plus marquante qu'une théorie. La mythologie propose donc une stratégie à l'égard de la mort. Elle propose une façon de se voir soi-même dans le monde.  
La mythologie délivre-t-elle une morale? Pas au sens où nous l'entendons aujourd'hui. Il ne s'agit pas d'une morale de l'interdit, du péché, du remords ou de la culpabilité; c'est une morale des valeurs. Et la principale valeur, pour les Grecs, est le bien. Il y a, d'un côté, ceux qui sont bien et, de l'autre, ceux qui ne sont pas bien. L'essentiel tient dans la façon d'être, d'agir, de parler, d'accueillir l'autre, de se comporter à l'égard de ses ennemis ou de ses amis... Tout cela définit ce que les Grecs appellent le "beau- bien", qui n'a pas la connotation morale qu'on lui prête aujourd'hui mais renvoie à l'idée que l'on ne saurait commettre de vilenies et de choses basses. Entrer dans la culture grecque permet de s'affranchir de l'embrouillamini des valeurs modernes où règnent la concurrence et la brutalité. C'est aussi affirmer que nous avons besoin, dans notre vie, de quelque chose qui ne soit pas de l'ordre de l'utilité immédiate mais de l'ordre de l'esthétique. De la beauté. Chez les Grecs, toute la culture tourne autour de la beauté. Ce qui prévaut n'est ni l'utilitarisme ni quelque vertu dictée de l'au-delà, mais le goût de la liberté et du débat intellectuel qui rendent la vie plus belle. C'est en cela, d'ailleurs, que la culture grecque se différencie de la culture égyptienne ou babylonienne. La mythologie affirme l'idée qu'il n'est pas de problème qui ne puisse être résolu par l'enquête intellectuelle et le débat culturel. La reprenez-vous à votre compte? Quand j'étais jeune, j'ai longtemps cru à l'idée de progrès, à cette idée que la science et la technique aboliraient un jour toutes les superstitions... Si je m'étais mieux pénétré des mythes grecs, j'aurais compris plus tôt que cette idée que nous devons être "comme maîtres et possesseurs de la nature", pour reprendre la phrase de Descartes, est absurde. Comment pourrions-nous dominer la nature puisque nous en sommes un morceau? Comment pourrions-nous dominer un tout dont nous sommes une partie? Pour les Grecs, l'homme est inscrit dans un espace. Il y est enfermé. Et il ne peut le dépasser qu'en comprenant quelle est sa place dans le monde et non en croyant qu'il peut prendre toute la place du monde. Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes? L'historien Paul Veyne a très bien posé la question [Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes? , Points/Seuil]. La réponse réside dans le sens que vous donnez au verbe "croire". Le mot croyance définit des plans d'adhésion intellectuels très divers. "Je crois que deux et deux font quatre", répond Dom Juan, chez Molière. Je crois que la Terre est ronde, ce qui est déjà différent, et que c'est elle qui tourne autour du Soleil. Je crois en la démocratie, en la fraternité, et en tout un tas de choses que je n'ai pas vérifiées... Mais ce n'est pas le même type de croyance que la foi, qui est adhésion à une vérité qui me dépasse et est imposée par le fait que l'on participe à une Eglise. Ces croyances sont différentes du credo religieux. Ce dernier est totalement absent de la religion grecque. Les mythes grecs ne constituent pas des vérités auxquelles il faut adhérer: on en prend et on en laisse, on y croit sans y croire, on y croit parce que tous les Grecs y croient et qu'on est grec. De plus, il y a plusieurs versions de chaque mythe. Les mythes sont avant tout des récits transmis par la littérature. Aujourd'hui, quand vous lisez un roman, vous savez bien que c'est une fiction, mais il y a des romans qui ne tiennent pas debout et ne sont pas crédibles, et il y a des romans que vous croyez comme si c'était vrai. L'adhésion aux mythes vient de ce que le déroulement de l'histoire paraît ouvrir une compréhension sur les personnages. Les Grecs apprenaient L'Iliade et L'Odyssée par coeur. Mais y croyaient-ils? Oui, puisqu'ils pensaient que ces héros avaient existé dans des temps très reculés. Mais, en même temps, ils savaient très bien que c'était de la littérature. Il faut donc différencier les types de croyances.

Récemment, des historiens ont prétendu avoir la preuve qu'Homère n'avait jamais existé. Cette révélation change-t-elle quelque chose?
Franchement, on s'en fout complètement! Le rôle des historiens et des archéologues est de savoir ce qu'il y avait réellement au XVIe siècle ou au VIIIe siècle avant notre ère. Qu'Homère ait existé ou pas, qu'il ait écrit uniquement L'Iliade et pas L'Odyssée n'a guère d'importance, sauf pour les historiens et les spécialistes. Ce qui compte, ce sont les textes, formidables, et leur écho. En quoi L'Iliade et L'Odyssée sont-elles pour nous des textes fondateurs? Au vie siècle, les tyrans d'Athènes demandèrent aux spécialistes des poèmes d'Homère de coudre les différentes parties du poème pour lui donner une cohérence. Puis, pendant toute l'Antiquité, les textes les plus présents dans les bibliothèques furent L'Iliade et L'Odyssée. Au IVe siècle, Platon dira (pour le regretter) que tout se trouve dans Homère: la morale, la politique, ce que sont les dieux, comment construire un bateau, se battre, se réconcilier, labourer, parler... Homère est une sorte de savoir universel. Si ça, ce n'est pas le fondement de notre culture! Même au Moyen Age et à l'époque classique, toutes les épopées ont été influencées par L'Iliade et L'Odyssée.

"Pour les grecs, il s'agit non pas de conserver la vie mais de la conquérir"

Vous avez écrit que L'Odyssée était plus intéressante que L'Iliade. En quoi? L'Iliade raconte la vie d'une armée mais assez peu le fonctionnement de la cité. Or L'Odyssée nous présente de façon très précise la vie sociale à Ithaque, la patrie d'Ulysse. On y décrit le rôle de l'Assemblée, le pouvoir et les problèmes que rencontrent les rois... Mais les deux textes ne peuvent être envisagés indépendamment l'un de l'autre. Car L'Odyssée est, d'une certaine façon, une contre-Iliade. L'Iliade est fondée sur une notion centrale qui est l'héroïsme, réponse apportée au problème du sens de la vie et de la mort. Rappelez-vous qu'Achille doit choisir entre une vie bien tranquille jusqu'à un âge avancé, entouré de l'affection des siens, et une vie très brève. Dans le premier cas, il vivra, certes, longtemps, mais ne laissera rien après sa mort. Ce sera la disparition pure et simple, il sera effacé comme s'il n'avait jamais existé. Dans le second cas, il devra tout le temps mettre sa vie en jeu, mais s'il meurt, il survivra car il obtiendra la gloire auprès des hommes. Or qu'est-ce que la vie sans la gloire? Achille choisit la seconde solution. En effet, aux yeux des Grecs, vous n'existez vraiment qu'à condition de connaître la gloire. Pour eux, il s'agit non pas de conserver la vie mais de la conquérir; or le seul moyen de la conquérir, c'est la mort. La mort comme moyen de réaliser une non-mort en gloire, telle est l'invention grecque. Mais, dans L'Odyssée, lorsque Ulysse se rend aux Enfers et croise l'ombre d'Achille, mort au combat, ce dernier revient sur son choix et lui dit qu'il préférerait être le dernier des misérables sur terre mais être en vie, plutôt que le premier des morts. L'Odyssée est donc L'Iliade inversée. Les deux textes dialoguent de manière passionnante. Et que nous dit l'histoire d'Ulysse? Ulysse n'est pas à la recherche de la gloire. C'est l'histoire d'un homme qui veut rentrer chez lui et vieillir auprès de son épouse et de son fils. Ulysse, c'est l'anti-Achille. Son aventure consiste à savoir comment il peut accomplir son destin, qui est de retrouver sa patrie et de ne pas renoncer à lui-même.

Invitation


Thursday, March 21, 2013

VERNANT - Principaux ouvrages

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1962 : Les origines de la pensée grecque, coll. Mythes et religions, 128 p., Paris, PUF ; coll. Quadrige, 7e éd., 1990. Trad. : espagnole, 1965, 1970 ; grecque, 1966 ; polonaise, 1969, 1996 ; japonaise, 1970 ; portugaise, 1972 ; 9e éd. 1996 ; italienne, 1976 ; tchèque, 1980 ; anglaise, 1982, 1989 ; allemande, 1983 ; slovène, 1986 ; russe, 1988 ; serbo-croate, 1990 ; arabe, 1990 ; roumaine, 1995 ; chinoise, 1996 ; albanaise.
1965 : Mythe et pensée chez les Grecs. Études de psychologie historique, coll. Textes à l'appui, 331 p., Paris, Maspero ; 3e éd. 1969. 1971 : nouvelle éd. revue et augmentée, Petite Coll. Maspero, 2 vol. de 230 et 146 p., Paris, 6e éd. 1982. Trad. : italienne, 1970, 1978 ; portugaise, 1973 ; grecque, 1975 ; espagnole, 1983, 1985, 1993 ; anglaise, 1983. 1985 : nouvelle éd. augmentée, Coll. Fondations, 1 vol. de 432
p., Paris, La Découverte ; coll. Poche 1996 ; trad. : grecque, 1990 ; roumaine, bulgare, coréenne.
1968 : Problèmes de la guerre en Grèce ancienne, volume collectif, 308 p. et 12 planches, Paris-La Haye, Mouton, 2e éd. 1985.
1972 : Mythe et tragédie en Grèce ancienne (en collaboration avec Pierre Vidal-Naquet), coll. Textes à l'appui, 187 p., Paris, Maspero ; 7e éd. 1989. Trad. : italienne, 1976 ; portugaise, 1977 ; grecque, 1978, 2e éd. 1988 ; anglaise, 1981 ; espagnole, 1986 ; serbo-croate, 1992 ; slovène, 1994 ; arabe.
1974 : Mythe et société en Grèce ancienne, coll. Textes à l'appui, 255 p., Paris, Maspero ; 5e éd. 1988, coll. Fondations. Trad. : anglaise, 1980, 2e éd., 1982, 3e éd. 1988 ; italienne, 1981 ; espagnole, 1982 ; allemande, 1987 ; grecque.
1974 : Les ruses de l'intelligence. La métis des Grecs (en collaboration avec Marcel Detienne), Nouvelle bibliothèque scientifique, 406 p., Paris, Flammarion, 2e éd. 1978, Coll. Champs. Trad. : italienne, 1978 ; anglaise, 1978 ; espagnole, 1988 ; grecque, 1993 ; arabe et croate.
1974 : Divination et rationalité, volume collectif, 320 p., Paris, Éd. du Seuil, 2e éd. 1990. Trad. italienne, 1982.
1976 : Religion grecque, religions antiques, coll. Textes à l'appui, 49 p., Paris, Maspero.
1978 : Oedipe et Prométhée. La conception mythique de l'homme en Grèce, Tokyo, Misuzu Shobo publ. Cie, 180 p. (en japonais).
1979 : Religions, histoires, raisons, Petite Coll. Maspero, 137 p., Paris, Maspero. Trad. : italienne, 1982 ; grecque.
1979 : La cuisine du sacrifice en pays grec (en collaboration avec Marcel Detienne), coll. Bibliothèque des Histoires, 336 p., Paris, Gallimard, 2e éd. 1983. Trad. : italienne, 1982 ; anglaise, 1989 ; japonaise, roumaine.
1982 : La mort, les morts dans les sociétés antiques (sous la direction de G. Gnoli et J.-P. Vernant), Cambridge University Press et Maison des Sciences de l'Homme.
1985 : La mort dans les yeux. Figures de l'autre en Grèce ancienne, coll. Textes du XXe siècle, Paris, Hachette, 90 p., 3e éd. 1990. Trad. : espagnole, 1986, 1990 ; italienne, 1987 ; allemande, 1988 ; portugaise, 1988, 1991 et 1992 ; grecque, 1992 ; anglaise, arabe.
1986 : Mythe et tragédie II (en collaboration avec Pierre Vidal-Naquet), coll. Textes à l'appui, 1 vol. de 300 p. Trad. : anglaise, les 2 volumes en 1988 ; italienne et portugaise, 1991 ; grecque, 1992 ; slovène, 1995 ; arabe.
1986 : Corps des dieux (sous la direction de Ch. Malamoud et J.-P. Vernant), vol. collectif, 408 p., série Le Temps de la réflexion, VII, Paris, Gallimard.
1988 : Travail et esclavage en Grèce ancienne (en collaboration avec Pierre Vidal-Naquet), 1 vol. de 176 p., Bruxelles, Éditions Complexe.
1988 : Oedipe et ses mythes (en collaboration avec Pierre Vidal-Naquet), 1 vol. de 148 p., Bruxelles, Éd. Complexe.
1989 : L'individu, la mort, l'amour. Soi-même et l'autre en Grèce ancienne, 1 vol. de 233 p., Paris, Bibliothèque des Histoires, Gallimard ; Folio Histoire, 1996.
1990 : Mythe et religion en Grèce ancienne, 1 vol. de 126 p., Paris, La Librairie du XXe siècle, Seuil. Trad. : espagnole, 1991 ; italienne, portugaise, danoise, brésilienne, 1992 ; allemande, roumaine, grecque, 1995 ; polonaise, 1998 ; arabe, chinoise.
1990 : Figures, idoles, masques, 252 p., Paris, coll. Conférences, essais et leçons du Collège de France, Julliard.
1990 : La Grèce ancienne 1. Du mythe à la raison (avec Pierre Vidal-Naquet), 320 p., Paris, coll. Points Essais, Seuil.
1991 : Mortals and immortals. Collected essays by J.-P. Vernant, (F. Zeitlin editor), 241 p., Princeton, Princeton University Press.
1992 : La Grèce ancienne 2. L'espace et le temps (avec P. Vidal-Naquet), 228 p., Paris, coll. Points Essais, Seuil.
1992 : La Grèce ancienne 3. Rites de passage et transgressions (avec P. Vidal-Naquet), 340 p., Paris, coll. Points Essais, Seuil.
1993 : L'Homme grec (sous la direction de J.-P. Vernant), 367 p., Paris, coll. L'univers historique, Seuil. Trad. : italienne, 1991 et 1997 ; espagnole, portugaise, 1993 ; allemande, grecque, 1995.

1993 : Ai confini della Storia (avec Aldo Schiavone), 66p., Milan, Piccola Biblioteca Einaudi.

1995 : Passé et Présent. Contributions à une psychologie historique, réunies par Riccardo di Donato, Edizioni di Storia e Letteratura, Raccolta di Studi e Testi, 188 et 189, 2 vol. de 786 p.
1996 : Entre mythe et politique, La Librairie du XXe siècle, Paris, Seuil, 580 p. Trad. : allemande, 1997 ; italienne, 1998 ; arabe, chinoise, espagnole, portugaise.
1997 : Mythes grecs au figuré. De l'Antiquité au Baroque (sous la direction de S. Georgoudi et J.-P. Vernant), Le Temps des Images, Paris, Gallimard, 234 p.
1997 : L'Orient ancien et nous. L'écriture, la
raison, les dieux (Jean Bottero, Clarisse Herrenschmidt, Jean-Pierre Vernant), Paris, Albin Michel, coll. Idées, 227 p.
1997 : Dans l'oeil du miroir (avec Françoise Frontisi-Ducroux), Odile Jacob, Paris, 298 p. Trad. : italienne sous le titre Ulisse e lo specchio, 1998 ; espagnole, grecque.



— «The spiritual Universe of the Polis », Antiquities ed. by Nicole Loraux,
Gregory Nagy and Laura Slatkin, The New Press, New York, 2001, p. 19-30.
— «Hestia-Hermes. The religions expression of space and movement »,
Ibidem, p. 112-133.
— «The masked Dionysus of Euripides’Bacchae », Ibidem, p. 334-345.
— «Weaving Friendship », Salmagundis, ed. by Skidmore College, Saratoga
Springs, New York, no 130-131, Spring Summer 2001, p. 75-87.
— «La mort ou les morts ? ». Autour des morts ; Mémoire et identité, Actes
du Ve Colloque international sur la sociabilité, Rouen, 19-21 nov. 1998, Publications
de l’Université de Rouen, no 296, p. 7-10.
— «Pandora », Ève et Pandora. La création de la première femme, sous la
direction de Jean-Claude Schmitt, Paris, Gallimard, Col. Le temps des images,
2002, p. 29-37.
— «L’autre de la Grèce. Entretien avec J.-P. Vernant », L’autre. Cliniques,
cultures et sociétés, vol. 2, no 3, 2001, p. 411-428.
— «A Beautiful Death and the Disfigured Corpse in Homeric Epic », Oxford
Readings in Homeric Iliad, ed. by Douglas L. Cairns, Oxford University Press,
2001, p. 311-341.
— «Odysseus osobne », Fenomen jako filosoficky problem, ed. Archiv Jana
Patoeky, Oikoumene, 2000, p. 95-129.
— «Jean-Pierre Vernant », Passado y presente, Dialogos (Mauricio Jalon et
Fernando Colina), Vallalolid, ed. Cuatro, 1996, p. 41-62.
— «Epilogue », Pour l’amour du grec, présenté par Jacqueline de Romilly et
Jean-Pierre Vernant, Paris, Bayard, 2000, p. 167-173.
— «Entretien », Propos recueillis par Antoine Spire, Le Monde de l’Education,
mai 2002, p. 16-21.
— «Souvenirs de collégien », Le Disciple et ses maîtres. Pour Charles
Malamoud, sous la direction de Lyne Bansat-Boudon et de John Scheid, Le
Genre Humain, avril 2002, p. 99-103.

VERNANT - biographie

Jean - Pierre VERNANT

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Né le 4 janvier 1914 à Provins
Décédé le 9 janvier 2007

Études secondaires au Lycée Carnot, à Paris.
Études supérieures à la Sorbonne.
Agrégé de l'Université (Philosophie), reçu 1er, 1937.
Service militaire, guerre, résistance, 1937-1945.
Ancien chef des Forces Françaises de l'Intérieur, du Sud-Ouest de la France, sous le pseudonyme de Colonel Berthier.

Professeur de Philosophie au Lycée de Toulouse, puis au Lycée Jacques Decour, à Paris, jusqu'en 1948.
Attaché, puis chargé de Recherches au Centre National de la Recherche Scientifique, de 1948 à 1957.
Directeur d'Études à l'École Pratique des Hautes Études, VIe et Ve sections, de 1957 à 1975.
Fondateur en 1964 et Directeur jusqu'en 1985, du Centre de Recherches Comparées sur les sociétés anciennes (Centre Louis Gernet).
De 1975 à 1984, Professeur au Collège de France, titulaire de la chaire d'Étude comparée des religions antiques.
A partir de 1984, Professeur honoraire au Collège de France.



La traversée des frontières

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« C’est parce que la vie n’a aucun sens préexistant que nous pouvons, nous, lui en donner un. Telle est notre affaire, notre responsabilité. La vie n’a pas d’autre sens que celui que les hommes essaient de lui donner. Il n’y a pas de destin de l’humanité : c’est nous qui décidons du sens qu’aura notre vie. »
Jean-Pierre Vernant avec François Busnel, « Jean-Pierre Vernant : le sens de la vie », Lire, décembre 2004/janvier 2005 :
http://www.lire.fr/entretien.asp/idC=47849/idR=201/idG=8 .

--> Texte de Jean-Pierre Vernant, « La traversée des frontières », Seuil, 2004.
« Passer un pont, traverser un fleuve, franchir une frontière, c’est quitter l’espace intime et familier où l’on est à sa place pour pénétrer dans un horizon différent, un espace étranger, inconnu, où l’on risque, confronté à ce qui est autre, de se découvrir sans lieu propre, sans identité.
Polarité donc de l’espace humain fait d’un dedans et d’un dehors.
Ce dedans rassurant, clôturé, stable, ce dehors inquiétant, ouvert, mobile, les Grecs anciens les ont exprimés sous la forme d’un couple de divinités unies et opposées : Hestia et Hermès.
Hestia est la déesse du foyer, au cœur de la maison. Elle fait l’espace domestique, qu ‘elle enracine au plus profond, un dedans, fixe, délimité, immobile, un centre qui confère au groupe familial, en assurant son assise spatiale, permanence dans le temps, singularité à la surface du sol, sécurité face à l’extérieur.
Autant Hestia est sédentaire, refermée sur les humains et les richesses qu’elle abrite, autant Hermès est nomade, vagabond, toujours à courir le monde ; il passe sans arrêt d’un lieu à un autre, se riant des frontières, des clôtures, des portes, qu’il franchit par jeu, à sa guise.
Maître des échanges, des contacts, à l’affût des rencontres, il est le dieu des chemins où il guide le voyageur, le dieu aussi des étendues sans routes, des terres en friche où il mèneles troupeaux, richesse mobile dont il a la charge, comme Hestia veille sur les trésors calfeutrés au secret des maisons.
Divinités qui s’opposent, certes, mais qui sont aussi indissociables. Une composante d’Hestia appartient à Hermès, une part d’Hermès revient à Hestia. C’est sur l’autel de la déesse, au foyer des demeures privées et des édifices publics, que sont, selon le rite, accueillis, nourris, hébergés les étrangers venus de loin, hôtes et ambassadeurs. Pour qu’il y ait véritablement un dedans, encore faut-il qu’il s’ouvre sur le dehors pour le recevoir en son sein.
Et chaque individu humain doit assumer sa part d’Hestia et sa part d’Hermès.
Pour être soi, il faut se projeter vers ce qui est étranger, se prolonger dans et par lui.
Demeurer enclos dans son identité, c’est se perdre et cesser d’être.
On se connaît, on se construit par le contact, l’échange, le commerce avec l’autre.
Entre les rives du même et de l’autre, l’Homme est un pont. »


Ce texte, qui a été commandé pour le cinquantième anniversaire du Conseil de l’Europe, est inscrit parmi d’autres sur une borne du pont de l’Europe, qui relie Strasbourg à Kehl

Colloque franco-roumain/ Colocviu franco-român





Les 8 et 9 avril 2013 aura lieu à Bucarest le colloque franco-roumain  -->

Penser avec les Grecs: les travaux et la postérité de Jean-Pierre Vernant.  


Il s'agit d'une rencontre réunissant des savants formés auprès de Jean-Pierre Vernant, ce maître  dont l'enseignement et les écrits ont révolutionné les études classiques, avec des jeunes chercheurs formés dans le sillage de l'école de Vernant, et d'un public cultivé, qui veut mieux connaître et comprendre l'héritage de la pensée grecque. 

Le colloque est organisé conjointement par le Département d'histoire ancienne, archéologie et histoire de l'art et par le Centre de recherches comparées sur les sociétés anciennes, CICSA, de l'Université de Bucarest, et par l'Institut Français de Bucarest, sous la responsabilité de Christine COSTE, professeur de philosophie du Lycée français "Anna de Noailles" de Bucarest, d'Alexandra LITU, du Département d'histoire ancienne de l'Université de Bucarest, et de Zoe PETRE, professeur d'Histoire Ancienne de l'Université de Bucarest

 
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Intervenants :  Stella Georgoudi (ANHIMA-EHESS Paris), Catherine Darbo-Peschanski (ANHIMA- EHESS Paris), Françoise Frontisi Ducroux (Collège de France),  Marcello Carastro (ANHIMA-EHESS Paris),  Dan Dana (CNRS /ANHIMA, EHESS Paris),  Zoe Petre (Université de Bucarest),    Emilia Ndiaye (Université d’Orléans, Faculté de Langues Anciennes), Magdalena Indrieş (Université d’Oradea, Faculté de Lettres, Département de langue et littérature roumaine), Valentin Bottez (Université de Bucarest Département d’Histoire  Ancienne, Archéologie
et l’Histoire de l’Art),  Alexandra Liţu (Université de Bucarest Département d’Histoire  Ancienne, Archéologie et Histoire de l’Art),  Carol Cãpiţã, (Université de Bucarest, Département d’Histoire  Ancienne, Archéologie et  Histoire de l’Art), Gheorghe- Alexandru Niculescu (Institut d’Archéologie «Vasile Pârvan » de Bucarest), Theodor E. Ulieriu-Rostás (EHESS Paris & Université de Bucarest)